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Ibrahima Kébé
SENEGAL

Source : http://www.rurart.org/ressources/artistes/

© Ibrahima Kébé

 

Trois personnages sur fond rouge
acrylique sur toile, 73 x 55 cm.

 

Né en 1955 à Kaolack (Sénégal), d’origine sarakole.

Ibrahima Kébé est avant tout un peintre.
A une époque où les artistes ont abandonné le représentatif, le banalement quotidien, Kébé peint la vie, des scènes simples de la médina de Dakar, des instants fugitifs.

Mais ce qui frappe d'abord, c'est la palette picturale de Kébé. Les couleurs sont choisies de la manière la plus spontanée. Les larges aplats vifs des personnages se découpent sur des fonds travaillés, pastels, imbibés d'eau, de retenues. Sur ces fonds les couleurs des personnages vont à l'essentiel : on est plus dans la subtilité du décor, mais dans l'essence des êtres qui s'expriment avec force et beauté. La couleur éveille le sentiment ; vibrante, elle donne âme aux attitudes, aux regards. Aucune distraction inutile n'est permise. L'essentiel est dit vite et bien. Cette expression, l'artiste la maîtrise à la perfection lui conférant un style bien personnel comme les couleurs de Gauguin et d'un Matisse donnent aux peintures une unité aisément identifiable.

L'évolution de l'œuvre se fait donc ailleurs. Chez Kébé l'essentiel est le sujet et son traitement. Il y a quelques années, il saisissait les sortilèges de la vie, ses anormalités, ses monstruosités. Il peignait des mendiants, des handicapés, des fous, un rien dans la toile laissait entrevoir le porte-à-faux du sujet. La tête penchée indiquait que l'être fuyait en dedans en un soi inquiétant. Plus tard le " normal " a repris le dessus. Mais ces nouveaux portraits, bien que plus tranquilles, re-introduisent très vite le trouble quand on s'aperçoit l'incommunicabilité profonde de ces êtres. Les regards fuient, quittent la toile. Même ces amoureux du banc public donnent l'impression de se séparer avant même de s'être trouvés. Les groupes s'écartent. Les regards s'évitent.

L'artiste peint une société tendue à l'extrême où se cachent des secrets plus ou moins avouables, plus ou moins retenus. Symbole ultime, le chat animal farouche et indépendant, apparaît sur de nombreuses toiles, confirmant le secret, confirmant la difficulté d'être au quotidien. L'artiste est et a toujours été sincère. Sa peinture traduit ses inquiétudes et ses humeurs. Peintre de la société, il interfère sur elle projetant ses doutes et ses craintes, recherchant derrière l'anonymat des modèles des exemples à porter loin l'image de son propre devenir. Kébé se cache et peint. Au fil des expositions, il nous enseigne à voir ce qui ne se voit pas à regarder derrière la chaleur des couleurs, à percevoir le froid derrière les bleus, jaunes, ocres et rouges éclatants, à sentir la solitude dans la foule, le temps qui passe au rythme du chat et le grand cri universel d'être homme, humain parmi les humains.

Humain, seulement humain.

Daniel Sotiaux

 

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